Voilà longtemps qu’un cigare ne m’avait pas autant enthousiasmé, un véritable coup de cœur pour ce magnifique « Salomon » box pressed produit par la maison « Plasencia ». Un cigare d’une rare finesse qui joue sur une complexité ample et gourmande malheureusement si rare pour ce terroir et injustement remisé comme cigare de 3èmes zones après Cuba et la République Dominicaine. Mais les temps changent, voici un cigare qui démontre à lui seul toute la richesse de ce pays, sa diversité, ses ambitions à produire les meilleurs tabacs. (Le Nicaragua est à mon sens bien plus prometteur aujourd’hui qu’il y a 10 ans, grâce à des producteurs intelligents qui à force de travail ont pris conscience qu’il n’avait plus rien à envier au triangle d’or de la « Vuelta Abajo » dont la surface de jeu, certes unique au monde, reste bien inférieure à celle des régions d’Esteli, de Jalapa, de Condega et d’Ometepe au Nicaragua.)
Mais fermons cette parenthèse et voici en quelques lignes mon sentiment sur la dégustation de cette « Alma fuerte » nom donné à cette nouvelle ligne « Plasensia », cigare pour les âmes fortes. Au premier abord, ce module étonne par son aspect quadrangulaire « box pressed » attribué à un format de type « Salomon », plutôt fantasque et élégant à la fois. Sa cape maduro/oscuro légèrement moiré et mat ne laisse pas indifférent non plus par son uniformité.
Au nez, c’est une appréciation toutefois légère et éteinte, je dirais « peu démonstratif » dans ses senteurs. « Quelle frustration pour mon pif de presque rien sentir ! »
À cru, exercice toujours difficile pour l’amateur que je suis, m’amène sur un goût timoré de sous bois, des dernières feuilles d’automne qui finissent de s’empiler comme un millefeuille pâtissier aux pieds de troncs séculaires et figés dans l’air humide du petit matin. Je sais, j’en fais trop comme d’habitude ! Je me calme…
Dès la mise à feu, c’est une attaque franche, puissante et épicée qui me laisse perplexe sur une sensation de déjà fumé. Cette entrée en matière sec en bouche confesse des saveurs principalement orientées sur l’avant du palais et offrant une mise en bouche peu convaincante, mais conforme dans sa forme. Alors doit-on exiger plus de rhétorique aromatique et gustative dans un cigare à 24 qu’un autre à 12chf ? Je pense que non, malheureusement.
Passez 15 minutes environ, ce premier temps s’harmonise entre consistance aisée et puissance éclairée, le tout sur des arrangements de saveur « fumée/ torréfiée » très agréable à la complexité affable à cet instant. Un cigare doué d’un tirage excellent qui progresse dans sa normalité.
Mais tout vient à point à qui sait attendre, en effet c’est à partir d’une bonne demi- heure que ce « Salomon » se révèle dans ce 2ème temps. Une évolution surprenante toute en rondeur et en suavité qui ravit les papilles de notes délicates, au foin d’alpage fait de mille fleurs, à la floralité subtile et de café latté. Moins puissant à présent, celui- ci s’équilibre sur une forme crémeuse et biscuité tout à fait marginale. Un cigare bluffant si on prend la peine de le déguster et non le fumer !
« C’est à ce moment- là que toute la suggestivité de l’amateur prend tout son sens et exalte sa propre perception des arômes dans une complexité très personnelle et toujours étonnante ». Voilà, ma définition d’un bon cigare, une parmi tant d’autres vous me direz !
Dans le dernier temps, son évolution est désormais établi et plus méthodique (plus linéaire). Par contre, il continue avec émotion d’exposer et d’exploser religieusement en bouche ses notes fugaces de thé Earl Grey, de cannelle et d’empyreume léger soigneusement torréfié. Le final toujours très plaisant se renforce d’une richesse aromatique toujours bienveillante et rassasiante, vous donnant ce sentiment rare de déguster un cigare de gourmet. Un souvenir intact même après un mois l’avoir dégusté, le 26 avril dernier. Un cigare peut-être cher, mais très efficace pour ceux où celles qui recherchent un module d’une aromaticité intéressante et captivante. Ma note de cœur, 17/20 un excellent module pour cette nouvelle ligne « Alma fuerte » de Plasensia.
crédit photo: Mourade Hendor
-
Origine: tripe: Nicaragua, Sous-cape: Nicaragua, cape: Nicaragua (shade-grown Jalapa)
- Format: Salomon
- Taille: 178mm x 23mm
- Bague: 58
- Poids: 20.8 gr
- Année: 2016
- Prix: 24chf ( Casa Nueva Genève )
Salomon « Alma Fuerte » Plasensia.
très mauvais/ de 1 à 4
sans intérêt/ de 5 à 8
bon/ de 9 à 12
très bon/ de 13 à 16
excellent/ de 17 à 20
En savoir plus:
La famille Plasencia produit du tabac depuis cinq générations et est largement considérée dans l’ensemble de l’industrie comme l’un des plus grands producteurs de cigare au Nicaragua. Ils contrôlent également trois usines majeures et fabriquent des marques sous contrat pour de nombreuses sociétés de cigare. Mais le cigare « Alma Fuerte » représente la première poussée majeure de Plasencia pour obtenir leur propre marque (et leur propre nom) sur le marché.
« Toutes ces années, nous produisions du tabac et des cigares, mais nous manquions la meilleure partie », le consommateur final. Nous n’avions aucun lien avec eux. Et nous n’avions pas une marque majeure avec notre nom. Maintenant, nous pouvons nous connecter avec les détaillants et les fumeurs.
Plasencia a tiré de sa vaste bibliothèque de tabac vieilli et nous proposer ce mélange final d’Alma Fuerte, fabriqué entièrement à partir de tabac nicaraguayen. Le composant principal est le Criollo ’98, mais les Plasencia ont planté cette graine sur tout le Nicaragua. Alma Fuerte est un mélange de tabac de quatre régions: Estelí, Condega, Jalapa et Ometepe. Source: Cigaraficionado
Ca fait envie, comme d’habitude…
Quel plaisir de ne plus me sentir seul à dire que le Nicaragua n’a plus rien a envier aux autres.
Bientôt je pourrai peut être même oser dire que je préfère souvent ce terroir à celui de Cuba, sans m’attirer les foudres de « ceux qui savent » 🙂
J’aimeJ’aime