Avant tout, permettez- moi de vous souhaiter, mes voeux 2016 ainsi que de merveilleuses histoires olfactives, à travers de nouvelles découvertes fumigées et encensées, durant l’année des « Monkeys » !
Ainsi pour amorcer cette nouvelle année, mon choix, pour cette première analyse, c’est portée sur ce module de la Casa del Habano récemment sortie en 2014, le Roméo & Julieta « Cedros de Luxe », un cigare peut-être passé inaperçu, car moi-même je le découvre en même temps que vous, je sais, honte à moi ! Ainsi pour me faire pardonner, voici quelques lignes tirées du livre « Une Gourmandise » de Muriel Barbery, comme préface à cette dégustation. Des mots qui résonnent et s’entrechoquent à merveille sur l’identité, le caractère informel de ce cigare. Je vous laisse apprécier, la rondeur et la longueur de ce texte, tout est si bien dit !
« Dans ce rêve de fleurs et de légumes, j’écrasais sous mes pieds brunis l’herbe sèche et touffue du jardin et je m’enivrais des parfums. Et d’abord de celui des feuilles de géranium que, couché à plat ventre parmi les tomates et les petits pois, je froissais entre mes doigts en me pâmant de plaisir : une feuille à la légère acidité, suffisamment pointue dans son insolence vinaigrée mais pas assez pour ne pas évoquer, en même temps, le citron confit à l’amertume délicate, avec un soupçon de l’odeur aigre des feuilles de tomate, dont elles conservent à la fois l’impudence et le fruité. »
Comme pour le vin, l’acidité est essentielle dans un cigare, chez les Cubains il est assez fréquent de ressentir cette fraicheur, un peu, voire très suret dans des cigares très jeunes, âgé d’ 1 à 2 ans, mais avec le temps ceux-ci auront tendance à s’arrondir pour laisser place à une onctuosité plus éclatante et nivelée sur des saveurs grillées et torréfiées.
Parler d’acidité est de suite perçue comme un défaut, en effet cela le devient si la sensation en bouche s’apparente désagréablement à la succion d’un citron !
Tout comme pour les vins blancs, certains cigares seront plus secs en bouche, doux ou moelleux parfois. Cette acidité provient naturellement des acides organiques présents dans la plante comme l’acide malique par exemple que l’on trouve dans beaucoup de végétaux et de fruits. Le type de terroir y est pour beaucoup aussi. Je vous conseille ce lien sur la composition des sols sur le site « vinsvignesvignerons » qui aborde de manière explicite la question.
D’aspect ce « Cedros de Luxe » n’a aucun reproche à se faire, la construction est soignée, le module ferme et moelleux développe subtilement un parfum boisé, de cèdre et de beurre rance, celui que grand-mère entreposait avec le sucre et le café dans sa petite armoire en formica, placée au-dessus de l’évier, éveille un relent oublié d’odeur abominée, mais combien précieux dans mes souvenirs. Au mouillage, la cape me laissera un goût amer et distinctif sur la langue et les lèvres.
Dès l’allumage, tel un dragon crachant sa fumée, l’attaque est franche, assez tannique et peu onctueuse, des sensations dessinées par le goût olfactif de ces vieux meubles en bois vernis ou celle du parquet vitrifié. Une forme gustative très identifiable et très éveillée en bouche.
Après quelques dizaines de minutes de réchauffement, le premier chapitre offre une histoire relativement endémique, nous sommes toujours sur un profil aromatique assez acide avec un peu d’astringence. L’ensemble libère ses arômes dans une consistance toutefois équilibrée, faite de notes de terre, de poivron, de noix et de bois précieux. La rondeur, quant à elle, pèche tout de même par son jeunisme et son manque de maturité, mais s’affirme avec brio dans une persistance plus poivrée et plus animée pour les papilles. L’ensemble acidité/ épicée, s’équilibre avec contenance sur une amplitude très ouverte en bouche. Ma foi, cette partie hisse les couleurs d’un Roméo très appuyé dans sa forme, risquant l’oppression dans son évolution, en présentant un cigare d’une belle harmonie, plaisante et licencieuse d’un réel intérêt gustatif.
La seconde partie ne déroge en rien à ce fumage, les sensations sont de bonnes consistances et déploient à leur tour, une approche plus roborative maintenant, grâce à une force en constance élévation, plus présente et bien contrebalancée dans le duo acidité-épicé. Des sensations largement soulignées en amont de cette dégustation, gustativement bucolique pour ne pas dire rustique et de complexité moyenne, mais bienveillante, il se révèle avec beaucoup de pudeur et de fraicheur dans des notes de sous-bois humide, de poivre vert et de bois précieux.
Cette dernière continue de diluer des notes devenues cuisantes, sur un refrain rassasiant et plus fortuné, de poivre et d’un soupçon frais et volatil d’anis étoilé, malheureusement asphyxié par ce fond lourd de terre brûlée, de torréfié puissant localisé sur l’arrière du palais. Rien de très glorieux sur ce 3e temps, malgré tout, ce cigare dégage un agrément honnête dans ses accords, celui d’un cigare mesuré et harmonieux dans sa forme, plaisant à déguster ! Ma note de cœur 16/20, un « Cedros de luxe » à redécouvrir si ce n’est encore fait.
- Origine: tripe: Cuba, sous-cape: Cuba, cape: Cuba
- Format: robusto extra
- Taille: 141mm x 20mm
- Bague: 50
- Poids: 13.5gr
- Année: 2014
- Prix Suisse: 13chf
très mauvais/ de 1 à 4
sans intérêt/ de 5 à 8
bon/ de 9 à 12
très bon/ de 13 à 16
excellent/ de 17 à 20
Bonne année à toi l’ami et meilleurs vœux 2016 😉
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