Ma journée avec Hendrik Kelner ( 1er partie ) Davidoff

 

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Nous sommes le 20 mai 2014 et il est précisément 13h30 ! Lorsque je reçois un appel inattendu de Thomas Mathys (responsable de la boutique Davidoff à Genève) : « Bonjour Edmond, c’est Thomas ! Une petite info qui devrait te plaire pour ton blog. Hendrik Kelner sera sur Genève cette fin de semaine, que dirais-tu de le rencontrer ce vendredi  lors d’un déjeuner suivi d’une interview exclusive autour d’un cigare au sein de notre boutique ? »

Waouh…je n’en croyais pas mes oreilles !! Un peu abasourdi et après quelques secondes de réflexion, pas beaucoup plus ! : « C’est génial d’avoir pensé à moi Thomas, c’est un grand ‘OUI’ bien sûr ! Un privilège que je ne manquerai pas.» Passons les détails afin de m’organiser, le rendez- vous était pris pour 14h30, restaurant « La Cigogne » établissement Genevois très réputé de la ville, situé place de Longemalle à 50mètres de la boutique. Un peu anxieux tout de même de rencontrer ce personnage, celui par qui Davidoff conçoit aujourd’hui et cela depuis presque 25 ans tous les cigares dominicains du groupe Davidoff en passant par AVO et Griffin. Il est aussi l’ami des premières heures de Zino Davidoff, rencontré dans les années 90, une collaboration courte mais efficace entre ces deux hommes de talent qui façonnera à jamais le renouveau de la marque jusqu’à nos jours. Malheureusement Zino quitta l’aventure en 1994 (date de son décès).

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Hôtel « La Cigogne »

Cette rencontre avec Hendrik Kelner me donne l’occasion inespérée d’effleurer le génie d’un homme dont la vie entière a été consacrée au cigare, comme si un gastronome amateur se voyait invité à se joindre à la table d’un Paul Bocuse ou d’un Alain Ducasse et dans le même temps déguster en fin de repas un vieux rhum Clément sous la tutelle avisée d’un Mr De La Guigneraye’! Cette analogie des genres n’est en rien exagérée pour tout aficionado qui se respecte. Voici pour vous le résumé de cette journée trépidante, une interview construite sous forme de brunch anecdotiques et métaphoriques, d’explications agronomiques et passionnantes signées Henky (Hendrik Kelner).

Vendredi 23 mai 2014, 14h…Le jour J.

Après avoir pris place, moi, Thomas, Mr Kelner et Mme Kelner sans oublier Roxana une amie Cubaine qui s’est volontiers jointe à nous pour m’aider dans les traductions espagnoles. Nous commençons tranquillement nos agapes entrecoupées de quelques généralités, de discussions légères et curieuses sur les différents choix culinaires de nos plats. Pour ma part, je choisis les ris de veau cuits au four à l’étouffée dans sa feuille de tabac, tout à fait de circonstance pour commencer cette journée. 45 minutes plus tard, le serveur revient et me présente le ris de veau à la sortie du four encore tout enveloppé, amusé par ce plat Henky demande à sentir de plus près ce drôle de paquet ! Après quelques minutes de réflexion, il affirme tranquillement : « C’est sûrement une feuille de Virginie, la couleur très ‘amarillo’ (jaune) et son goût douceâtre s’adapte parfaitement à la cuisine de chef » Le regard médusé, nous acquiesçons cette première leçon avec étonnement. Plus détendu maintenant en cette fin de repas, le vin aidant, nous conversons allégrement entre espagnol, anglais et français sur des thèmes divers et variés sous l’égide et la bonhomie d’un Henky toujours soucieux de nous donner les meilleures explications sur les diverses questions abordées, sans oublier la gentillesse et l’altruisme de Mme Kelner pour qui la culture du tabac fait partie de sa vie, en effet Mme Kelner participe activement aux diverses recherches agronomiques entreprises en République Dominicaine par son mari.

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Mme Kelner & Mr Kelner

 

ED : « A la question, quel est votre secret pour créer de nouveaux mélanges ?  (Question un peu absurde quand on y pense, mais pas forcément !), Voici son idée sur la question ».

HK: « Quand je rêve, je crée ! Vois-tu lorsque tu dors, il est difficile de se souvenir de tout. Mais avec le temps et de la concentration, j’ai pris l’habitude de prendre une douche tiède de suite au réveil, pendant ce moment de quiétude avec moi-même je me remémore mes rêves avec plus de clarté, tout me revient doucement au bout de quelques minutes ! Ainsi en dormant je travaille à de nouveaux mélanges, de nouvelles idées tout en rêvant. Ensuite lorsque je retrouve mes fidèles collaborateurs et amis, certain en me voyant arrivé me lance d’une voie ironique «  Vous, vous avez pris une bonne douche ce matin, qu’avez-vous rêvez pour nous ce matin señor Kelner ? » Le secret de la réussite est très simple: ‘Dormir pour ne pas se reposer, mais dormir pour rêver ! » Un très bel aphorisme dans lequel nous pourrions tous puiser notre inspiration et nos ambitions ».

ED : « Et aujourd’hui Mr Kelner, qu’elles seraient vos rêves de cigare pour l’avenir ? ».

HK: « On ne peut pas savoir quelles seront les meilleurs mélanges à venir. Et je ne crois pas qu’un jour nous le saurons, c’est quoi un bon cigare ?, c’est quoi la meilleure terre ?, c’est quoi le meilleur terroir ?, la meilleure semence, etc…Si nous arrivions à répondre à toutes ces interrogations, tous nos espoirs et nos rêves n’y survivraient pas. Chaque nouvelle journée doit être consacrée à créer et tester de nouvelles choses et les améliorer, apprendre et comprendre un petit peu plus chaque jour sur la nature. La condition n°1 pour éveiller l’apprentissage, c’est l’humilité ! On peut s’instruire de quelqu’un qui cultive la terre alors que cette même personne ne sait ni lire et ni écrire. Celui qui prétend tout savoir n’est qu’un âne, en définitive,  il ne sait rien, il ne comprendra jamais le travail des paysans ainsi que la nature et le temps qui façonnent jour après jour la semence, la plante.  Encore une seconde chose, plus tu penses avoir compris, moins tu en sais ! Parcequ’une découverte apporte à son tour son lot de nouvelles questions, comme une multitude de portes qui s’ouvrent simultanément vers d’autres horizons, d’autres interrogations ».

ED : « Comment depuis 25 ans de collaboration avec Davidoff, votre travail s’effectue-t-il  en république dominicaine? Etes- vous influencé, voire dirigé par les différents responsables qui gèrent les intérêts commerciaux de la marque aux quatre coins du monde ? ».

HK: « La création, la composition d’un cigare s’écrit comme de la poésie, celle-ci provient de l’intérieur de soi, elle fait appel à des émotions très personnelles que l’on couche un jour sur du papier pour ne pas les oublier, je sais  ça fait très romantique, mais tout commence comme cela ! Mais à côté, comme tout commerce, les impératifs de marché nous rappellent que nous devons  satisfaire certaines demandes du marché. Ecrire ce que l’on vend demande à suivre un cheminement précis alors que la poésie est illimitée! Dans le cigare, comme dans la poésie il doit y avoir de la rime. La seule différence entre un cigare et un poème, c’est qu’un poème ne change pas, il se lit toujours de la même façon grâce à une ponctuation précise. Alors que le cigare, lui change tout le temps, il faut sans cesse équilibrer la stimulation et la consistance qui évoluent à chaque fois afin d’être le plus proche possible de la recette initiale.

J’aime comparer le cigare à l’amitié. Qu’est-ce que l’on attend de son meilleur ami ? On attend d’un ami qu’il soit fidèle avant tout, (rire) mais rien à voir avec l’autre le ‘Fidel…

Bref tu attends d’un ami une amitié loyale et équilibrée à chaque fois que tu le retrouves. Les relations avec un ami du type bipolaire ou lunatique par exemple deviendraient angoissantes pour à rencontre !

Un cigare est comme votre meilleur ami, même après 1 semaine, 1 mois, 1 année, les retrouvailles doivent être les mêmes et conformes aux premiers jours de votre rencontre. Pour le cigare, cette régularité et cette consistance donnent au fumeur un sentiment  sécurisant et de quiétude. Le fumeur retrouve dans sa dégustation un souvenir olfactif rassurant et apaisant, celui des retrouvailles avec un fidèle ami ! ».

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Hendrik Kelner

 

ED : « Mr Kelner poursuit cette discussion, sur les origines du goût que nous percevons en fumant un cigare. ».

HK : « Tout provient de la fumée qui encense et stimule les différentes parties de notre langue. Prenons deux cigares différents, leurs stimulations respectives sont déterminées par leur génotype (c’est-à-dire le patrimoine génétique de la semence) et de son environnement (la terre, le climat et le labeur des hommes). Cette saveur perçue dans ta bouche provient du type de terroir, de la graine choisie, du choix des feuilles sur la plante, du soleil, de la pluie, ensuite vient le séchage et les divers processus de fermentation, jusqu’au mélange final qui déterminera l’identité de ce cigare. Toutes ces phases de production donneront une composition chimique unique à la fumée, ainsi qu’une consistance propre à ce type de cigare. Et ce mécanisme qui semble immuable évolue sans cesse à chaque récolte ».

ED : « Comment faites-vous pour retrouver chaque année les caractéristiques olfactives et individuelles de tel ou tel cigare? ».

HK : « Dans un premier temps, Il faut séparer les semences et les attribuer en fonction de chaque terroir, ensuite au stade de la récolte vient le rôle de la sélection des feuilles (les différents étages foliaires), puis l’attribution de l’année de récolte, tout est minutieusement répertorié et stocké dans des entrepôts. C’est comme la cuisine d’un grand restaurant, le cuisinier mélange chacun de ses ingrédients pour réaliser une recette écrite et répétitive pour chaque service.Voilà, pourquoi tu associeras 20% de tabac de celui-là avec  40% de celui-ci, etc… ! Afin de toujours respecter une nomenclature précise et établie.Chaque tabac joue son rôle dans le goût, certains stimuleront uniquement le fond de la bouche, d’autres ce sera plus sur les côtés de la langue et parfois le bout de la langue avec des tabacs plus épicés. On trouve aujourd’hui des tabacs sucrés, salés, amers, acides, piquants, des sensations démultipliées par une multitude de nuances avec lesquelles nous composons chaque jour ».

Petite intervention de Thomas Mathys.

TM : « Maintenant, nous allons passer de la théorie à la pratique et nous rendre au magasin choisir un bon cigare, car la meilleure façon d’en parler, c’est bien sûr dans fumer un ! »

ED : « Quelles sont vos plus beaux souvenirs de cigare ? ».

HK : « J’ai bien des souvenirs, mais je ne pense pas que ce soit si important que ça ! Par contre, je me souviens d’une chose anodine qui me semblait peu importante à l’époque, mais s’est révélée dans le futur d’une belle réussite que je peux classer comme ‘bon souvenir’. Cela remonte à 11 ans maintenant, à l’époque nous avions décidé de changer le profil d’un cigare Davidoff, pour cette demande je m’étais procuré de très belles feuilles de cape en provenance du Nicaragua, malheureusement après moult débats divergents avec les différents responsables, ce projet de feuille de cape Nicaraguayenne tomba dans l’abandon et finalement toute cette production fût tout simplement oubliée pendant 10 ans. Mais passé ce temps, les choses ne pouvaient qu’évoluer dans le bon sens, puisque le marché du cigare au Nicaragua très florissant nous suggérait de créer une ligne ‘Davidoff Nicaragua’. Après un bon rêve et une bonne douche (rire complice),  l’idée d’utiliser mes feuilles oubliées du Nicaragua devenait limpide ! Voilà un très bon souvenir, comme quoi rien n’est jamais perdu ! »

 

ED : « Petite pause après être sorti du restaurant, le temps de nous rendre de l’autre côté de la rue à la boutique Davidof ». Nous nous retrouvons  tous maintenant dans la boutique où nous croisons un fidèle des lieux, Mr Charly Schwarz, personnage singulier et attachant de Genève ( ancien reporter de presse, politicien et artiste photographe ) et bien sûr amateur de cigare, forcément quelqu’un de bien !

Charly profite de cet instant pour questionner Mr Kelner ».

CS : « Selon vous, quel serait le meilleur choix de cigare réunissant à la fois le goût à un prix moyen entre 8 et 11 CHF dans l’ensemble des marques Davidoff ».

HK : « Le Z – Class 643 Zino Platinium à 9,60 CHF réunit très bien ces deux qualités ! ».

ED : « Cette question anodine de Charly oblige Mr Kelner à développer sur la nature de la sous-cape, cette semence rare connue sous le nom de ‘Pelo d’Oro’, choisie justement pour la ligne ‘Z – Class ».

HK : «Le « Pelo d’Oro » est une semence hybride créée par les agronomes cubains au milieu du XXe siècle, croisement entre un tabac oriental turc et mexicain, mais en raison d’une trop grande vulnérabilité aux maladies, ce tabac expérimental fût rapidement abandonné dans les années 80 après quelques incidents majeurs dans les cultures de la vuelta à Cuba. Aujourd’hui quelques rares vegueros l’utilisent toujours pour une consommation locale uniquement dans la partie centrale (remedio). Aujourd’hui le Pelo d’Oro n’est plus utilisé dans les Caraïbes, le seul endroit possible pour le produire se trouve au Pérou dans une région suffisamment isolée sur les hauts plateaux, des conditions favorables à son développement. Pour les mêmes raisons, il pourrait aussi être cultivé dans certaines régions d’Ecuadors, je pense ! (L Pelo d’Oro est connu pour être un tabac assez puissant, savoureux ainsi que douceâtre).

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ED : « Que préférez-vous fumer Mr Kelner ? ».

HK : « Je fume souvent le robusto Special R parce qu’il est léger et qu’il n’irrite pas contrairement au Puro d’Oro Magnificos qui est beaucoup plus puissant et intense en goût. Ce type de format correspond très bien à ma physionomie, je vous rappelle que la traduction du mot espagnol ‘robusto’ se traduit en français par petit et costaud ! » (rire)

ED : « Alors moi, du haut de mon mètre 90, vous me conseillez surement un double R ! (double corona) » (rire). Sur les conseils avisés de Thomas Mathys, mon choix se confirme sur un ‘n°3 Anniversario colorado claro’, sans être une ‘édicion Limitada’ officielle, la production de ce cigare reste toutefois limitée ! Parfait comme transition ».

«  Je suis certain Mr Kelner que derrière ce cigare se cache une belle anecdote concernant sa création ! ». 

HK : « Dans les années 90, lorsque la stratégie marketing de lancer les cigares Davidoff dominicains sur le marché américain, notre renommé ex-directeur le docteur Ernest Schneider voulait pour ce nouveau départ des cigares légers et pas trop forts. Alors que jusque-là Cuba offrait une palette aromatique bien plus intense et forte. Il nous fallait alors se distinguer par des saveurs complètement différentes, un pari risqué mais qui s’avéra judicieux par la suite. D’ailleurs une de nos premières publicités aux USA illustrée par la photo d’un homme distingué et sans visage disait : « Les fumeurs ont affiné leurs palais, leurs goûts, leurs désirs et nous, nous avons affiné vos cigares avec un Davidoff n°1 ». En effet nous avions repris le n°1, N°2 et Ambassadrice, nom de leur homologue Cubain, mais cette fois dans leur version Dominicaine, aujourd’hui  plus connue par la ligne actuelle ‘Classic’. Des cigares dont la cape tirait résolument vers le jaune, plaisaient énormément en ce temps-là ! Une couleur beaucoup moins appréciée aujourd’hui.

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Doc Ernest Schneider

La toute première ligne Dominicaine fût la série ‘Mille’ mais sans le 6000 qui ne vit le jour que bien des années plus tard, suivi ensuite de la ligne ‘grand cru’ en remplacement des célèbres Châteaux. Puis la série anniversaire dont le n°2 remplacerait dignement l’extraordinaire ‘Don Pérignon’ cubain.

Lorsque la nouvelle mouture du magasin, 2 rue de Rive à Genève, ré-ouvrit, notre ex-responsable développement tabac/ cigare Mr René Hollenstein, émit l’idée que nous devions nous aussi posséder un format robusto dans notre gamme ! Mais un robusto d’une consistance plus forte, différent des précédents mélanges. Par contre, pour toujours nous distinguer, il ne devait pas s’appeler ‘robusto’. Voici comment est né la ligne ‘Spécial’ et le format robusto baptisé ‘Spécial R’ d’ 1/8e de pouce en moins sur la longueur, le ‘R’, clin d’œil à(R)ené Hollenstein l’initiateur de ce projet ! Tous les formats de cette série se succédèrent jusqu’au défi de rouler un format ‘pyramid’ appelé ‘Spécial T’,mais sans les moules que nous ne possédions pas encore, une véritable prouesse pour nos torcedores.

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René Hollenstein

Peu de temps après, toujours aux USA, un nouveau cigare très apprécié par son format plus long qu’un ‘robusto, baptisé ‘toro’ faisait son apparition sur le marché ! Forcément, nous devions offrir à nos clients ce type de module, mais sans l’appeler ‘toro’ bien évidemment. Voilà comment est né l’Anniversaire n°3, un nom plus chic dans l’esprit Davidoff pour lui donner plus d’élégance et une meilleure impression. Par contre notre cape était beaucoup trop claire pour les Etats-Unis, les développeurs marketing voulaient une sélection différente avec une couleur plus sombre pour les USA, la cape claire pour l’Europe et une teinte moyenne spécialement destinée à l’Espagne. (Un petit rappel, pour obtenir des feuilles de capes plus sombres, il faut choisir les feuilles du haut du plant de tabac qui s’accompagnera d’un séchage et d’une fermentation plus longue) .

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Bien entendu, nous allions répondre à cette demande et ainsi fournir des capes plus sombres pour l’Anniversario n°3 aux USA, je vous passe les détails de son développement ! Mais au moment du tri de ces feuilles, nous nous sommes aperçu que certaines d’entre elles étaient encore plus sombres ! Que pouvions-nous en faire ? Les utiliser, mais comment ? L’idée de créer un nouveau cigare en petite quantité s’est trouvé être une excellente idée, ce que nous fîmes. Mais une fois lancé, cette ligne rencontra un succès étonnant sous le nom de ‘colorado claro’, la demande pour ce cigare était exponentielle, nous subissions la pression du marché américain qui en voulait toujours plus ! Malheureusement  nous ne pouvions pas en produire plus, ces feuilles plus rares ne suffisaient qu’à une petite quantité de cigares! Mais la demande était là, toujours plus forte, nous devions réagir rapidement. Après réflexion et quelques essais, nous avons créé une nouvelle cape en production limitée, plus simple à développer, laquelle serait un hybride (habano- Connecticut) bien plus aromatique que l’autre. Et voilà en quelques mots, l’histoire de ce toro ‘colorado- claro’ que vous dégustez actuellement. »

ED : « Mr Kelner, j’entends souvent dire que la cape n’influence pas le goût du cigare ? Qu’en pensez-vous ? ».

HK : « La seule réponse que je puisse donner en argumentant et : ça dépend ce que vous fumez !!

Explication ! Sur un  gros diamètre, la cape aura peu d’influence. Mais  prenez au contraire un diamètre plus petit, il y aura une influence évidente. Dans un cigare la cape représente de 15 à 25% de son volume total selon le type de module, elle n’est pas proportionnelle au poids du cigare. Prenons par exemple un format ‘perfecto’, vous êtes d’accord sur le fait qu’au départ, vous fumez plus de cape au milieu et plus vers la fin !! Un autre facteur important concerne la tripe, plus elle est légère, plus la cape influence son goût et à l’inverse pas du tout. Donc ça dépend !!

Voici une analogie qui résume cette influence, prend une soupe (environ 2 litres), tu ajoutes environ 2% de tabasco, et bien l’influence sur le goût dépend de ce que l’on ajoute dedans ainsi que la quantité !

Pourquoi certains cubains disent que ça a peu d’importance ? A Cuba, vous trouvez des terres principalement dédiées à la culture de cape, mais le rendement est très faible environ 18 à 20%, c’est très peu ! Mais le tabac non utilisé en cape n’est pas perdu pour autant, il est recyclé comme tabac de tripe !! Il y a quelques années lors d’une discussion avec un responsable  Cubain, concerné justement la non influence de la cape sur le goût du cigare, voilà ce que j’ai pu lui dire : « Imagine que je prenne une belle feuille de cape et que je mets mes 2 doigts au travers, ce n’est plus une cape ! Cela devient forcément une feuille de tripe, mais maintenant tu me dis que cette feuille a de la saveur ! Juste avant aucune et maintenant une influence ! » Il me répondit : «Oui, cette cape influe tout de même un peu sur le goût ».

Certaines sont sucrées, d’autres ont une légère salinité, voire même de l’amertume parfois, d’où une influence certaine sur l’ensemble de la dégustation, bien évidemment ! Prenons un dernier exemple sous forme d’expérience soumise à des visiteurs venus me rendre visite en république Dominicaine, je leur ai préparé 2 cigares identiques, sauf pour la cape dont l’une était une feuille ‘Connecticut’ et l’autre une feuille ‘Yamasa’. Après la dégustation de ces deux cigares, je leur pose ‘la question’ ? « Quel est votre cigare préféré ? » La plus grande proportion des gens choisit celui avec la cape ‘Yamasa’ plus épicé, plus intense et doux avec une complexité aromatique bien plus étendue qu’une cape ‘Connecticut’ ».

L’ intégralité de l’interview se trouve ICI

( Fin de la première partie, à suivre… )

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Henky et moi

4 commentaires sur “Ma journée avec Hendrik Kelner ( 1er partie ) Davidoff

  1. Excellent article!!! Merci pour ce retour d’expérience qui, je n’en doute pas, a du être vraiment exceptionnel pour toi !!!

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